Le mal logement est un sujet à part entière, qui nécessiterait une analyse complète. Seuls quelques enjeux sont abordés succinctement dans cet encadré.
En 2017, la Fondation Abbé Pierre estime à 3,8 millions le nombre de personnes en situation de grande précarité en matière de logement en France (sans domicile, mal logées ou sans logement personnel). Outre ces situations les plus graves, l’association estime que 12,1 millions de personnes sont touchées à des degrés divers par des difficultés de logement (effort financier excessif, précarité énergétique, risque d’expulsion locative, copropriétés en difficulté, surpeuplement, etc.). Selon les territoires, ces difficultés recouvrent des formes diverses, même si elles sont loin d’être exclusives les unes des autres.
Les sans-abri vivent en large majorité dans les grandes agglomérations
Les difficultés en matière de logement forment ainsi un large spectre, à l’extrémité duquel se trouvent les personnes sans domicile. C’est une population plutôt mal connue, car l’absence de logement constitue un obstacle pour les approcher. Selon l’enquête « sans domicile » menée par l’Insee et l’Ined en 2012 en France métropolitaine, 141500 personnes étaient sans domicile, dont l’essentiel (111 00037) dans les agglomérations de plus de 20000 habitants, 8000 dans les communes rurales et les petites agglomérations, et 22500 dans les centres d’accueil pour demandeurs d’asile. La population des sans-abri a connu une hausse de près de 50 % entre 2001 et 2012, et faute d’enquête plus récente, il est difficile d’évaluer l’ampleur de son augmentation depuis 2012. Outre les personnes sans logement, 440000 personnes étaient hébergées par la famille ou par un tiers (privation d’un logement personnel) en France métropolitaine en 2013 (soit 1 % de la population des plus de 18 ans), et 33100 dans les Dom (soit 2,5 % des plus de 18 ans).
Le surpeuplement et les difficultés à payer les loyers sont plus fréquents dans l’agglomération parisienne et les Dom
Si la privation de domicile personnel constitue l’une des manifestations les plus extrêmes du mal logement, des difficultés affectent également de nombreux ménages disposant d’un logement. En effet, parmi les personnes qui ont un logement personnel :
- 75500 vivent dans une habitation de fortune38 ;
- 2 millions de personnes vivent dans des logements sans confort39 ;
- 896 600 personnes sont en situation de surpeuplement accentué, essentiellement dans l’agglomération parisienne;
- un peu plus de 300 000 personnes sont à la fois en situation d’impayé de tout ou partie de leur loyer, et supportent un taux d’effort qui dépasse 40 % de leur revenu : plus du tiers d’entre elles sont également dans l’agglomération parisienne.
La précarité énergétique affecte les ménages vivant dans les espaces peu denses, où le parc est ancien
Enfin, 2,6 millions d’individus souffrent de précarité énergétique au sens strict, selon l’Observatoire national de la précarité énergétique. Il s’agit là du « noyau »40 de la précarité énergétique, qui comptabilise les ménages souffrant du froid dans leur logement, et rencontrant des difficultés à payer leurs factures d’énergie, parce qu’elles sont trop élevées et/ou parce que leurs revenus sont trop faibles. Les proportions du phénomène ont augmenté au cours des dernières années, passant de 3 % à 3,9 % des ménages entre 2006 et 2013. Ces ménages sont notamment nombreux dans les espaces où le parc de logements est ancien, et la population peu aisée (espaces peu denses des Ardennes au Massif Central, centre de la Bretagne, du Perche au Cotentin).
38. Insee, RP 2013
39. Enquête Logement, 2013
40. L’ONPE comptabilise également l’« enveloppe » de la précarité énergétique : il estime à 6 millions le nombre de ménages en situation d’inconfort thermique, de difficultés financières ou les deux à la fois (quand le noyau isole les ménages affectés par les deux).