Dans la moitié nord du pays, une part importante des actifs travaille dans de grands établissements (100 salariés et plus). En effet, presque toutes les zones d’emploi au nord d’une ligne Nantes-Besançon ont une part de salariés travaillant dans un grand établissement supérieure à 30 %. À l’échelle régionale, cette part est même systématiquement supérieure à 36 % dans le nord du pays. Au sud de cette ligne, cette part est inférieure à 30 % pour presque toutes les zones d’emploi, sauf pour celles des grandes villes (Bordeaux, Toulouse, Montpellier, Marseille, Clermont-Ferrand, Lyon). Ce contraste s’explique en partie par le secteur d’activité des établissements : l’industrie est plus présente au nord de la ligne Nantes-Besançon qu’au sud. Or, les établissements industriels sont généralement plus grands que ceux des autres secteurs : 8 % des établissements industriels comprennent 50 salariés ou plus, contre 2 % pour le commerce par exemple. Toutefois, le contraste Nord/Sud en matière de taille des établissements ne s’explique pas seulement par la différence de structure sectorielle. Les établissements situés dans la partie nord de la France sont, en effet, en moyenne plus grands que dans le Sud, et ce quel que soit leur secteur d’activité. Par exemple, les établissements de 50 salariés et plus représentent 9,3 % des établissements industriels du nord de la France, contre 6,5 % dans le Sud. Il en est de même pour les autres secteurs d’activités, mais de façon moins nette : pour le secteur des services, la part des établissements de plus de 50 personnes est de 3 % dans le Nord, contre 2,2 % dans le Sud.
Le nord et le sud de la France se distinguent aussi par la part de salariés travaillant dans un établissement contrôlé par une entreprise étrangère. Cette part est supérieure à la moyenne française (14,3 % des salariés) dans presque toutes les zones d’emploi des régions Grand Est, Hauts-de-France, Île-de-France et de l’ancienne Haute-Normandie. Son maximum est atteint dans les zones d’emploi alsaciennes proches de la frontière allemande (Sarreguemines, Haguenau, Molsheim-Obernai et Wissembourg, avec un taux de plus de 30 %). Comme pour la taille des établissements, c’est la forte implantation de l’industrie dans le nord de la France qui explique cette part importante d’établissements contrôlés par une entreprise étrangère ; dans le reste du pays, cette part est également élevée dans les grands pôles industriels (Toulouse, Grenoble, Lyon, Le Creusot, Saint-Nazaire, etc.).
Des facteurs de vulnérabilité ?
Ainsi, la moitié nord de la France est caractérisée par un tissu productif très spécifique : les établissements y sont souvent de grande taille, fortement orientés vers le secteur industriel, et plus qu’ailleurs détenus par des entreprises étrangères. Il existe dans le reste du pays des zones d’emploi très industrielles (Gien par exemple, avec 30 % d’emplois industriels, mais aussi Châteaubriant, Dôle, le Charolais, etc.), plutôt de petite taille et où les entités contrôlées par des entreprises étrangères sont souvent quelques gros établissements, par exemple dans les secteurs de la chimie, de l’industrie automobile, de la sidérurgie ou encore dans la fabrication de matériel agricole.
Prises isolément, ces caractéristiques ne constituent pas nécessairement un facteur de risque. L’ouverture au commerce international ou la présence d’établissements appartenant à une entreprise étrangère constitue même un indicateur d’attractivité des territoires et un élément moteur de croissance, comme le montre l’exemple de la métropole d’Aix-Marseille-Provence (voir encadré). En revanche, leur cumul place les territoires concernés dans une situation de vulnérabilité en cas de choc dans un secteur de l’industrie, notamment lorsqu’une partie importante de l’emploi industriel est concentrée dans un petit nombre d’établissements, de surcroît détenus par des entreprises étrangères.