Fin 2015, le taux de chômage des 15-74 ans était de 10,2 % en France, soit plus d’un point au-dessus de la moyenne de l’Union européenne à 28 (9,0 %). Le niveau du chômage français en 2015 est supérieur de 3 points à celui du dernier trimestre 2007 (7,2 %), et de 6,7 points à celui du dernier trimestre 1975 (3,6 %). La géographie actuelle du chômage en France est le résultat de dix années de hausse tendancielle ininterrompue (de la moitié des années 1970 à la moitié des années 1980), suivies de fluctuations au gré de la conjoncture économique, mais à un niveau se maintenant entre 7,5 % et 10,5 %. C’est une géographie historiquement très contrastée, et très stable, à l’image de celle de la croissance de l’emploi (voir chapitre 1A), même si elle tend à s’homogénéiser très lentement. Pourtant, s’il y a de moins en moins d’écarts entre les taux de chômage des différents territoires, les inégalités territoriales restent très fortes en matière de durée du chômage pour les demandeurs d’emploi. Pour mettre en perspective ces disparités, il est nécessaire de dépasser une vision statique du chômage, en le mettant notamment en regard avec la croissance de l’emploi ou avec les chances de retour à l’emploi, afin d’identifier les dynamiques à l’œuvre dans les territoires.
Dans les régions de l’Union européenne, la crise de 2008-2009 a été marquée par une meilleure résistance de l’emploi que de la production économique. Néanmoins, les destructions d’emplois ont été nombreuses : près de 5,5 millions d’emplois ont été supprimés dans la zone euro entre 2008 et 20132, notamment dans les secteurs de la construction et de l’immobilier, ainsi que dans l’industrie. La création de 2,2 millions d’emplois entre 2008 et fin juin 2015, principalement dans les secteurs des services aux entreprises, du commerce, du transport et de la fonction publique, n’a pas compensé les destructions : il subsiste un déficit net de 3,3 millions d’emplois non retrouvés. Dans l’hypothèse d’un rythme trimestriel de création d’emploi de 0,2 %, il faudra attendre 2018 pour retrouver le niveau d’emploi d’avant la crise. Le niveau du chômage s’est donc sensiblement accru dans la plupart des régions : dans l’ensemble des pays de l’UE15, il a augmenté de 3,9 points entre 2008 et 2013.
Cette crise a constitué un choc d’une ampleur différente selon les territoires : certaines régions européennes ont subi des pertes d’emplois et une hausse du chômage très importantes (en Espagne, au Portugal, en Grèce, en Irlande et dans la plupart des pays d’Europe orientale), quand d’autres ont mieux résisté. Un tiers des régions ont montré une certaine résilience aux effets de la crise, parmi lesquelles celles de quatre pays en particulier, qui ont maintenu ou augmenté leur niveau d’emploi dans la période récente : l’Allemagne (seul pays dont le taux de chômage a diminué depuis 2008), le Luxembourg, la Suisse et la Pologne.
La France et la Belgique moins affectées
Sur les deux tiers restants, la moitié des régions, dont une grande partie des régions françaises, sont sur le chemin de la reprise, tandis que les autres peinent à redresser cette tendance défavorable. En France comme en Belgique, le marché du travail a été globalement moins affecté que la moyenne de l’UE15, et la croissance de l’emploi y a lentement repris depuis 2010, sans être toutefois suffisante pour amorcer une baisse du taux de chômage.
À l’échelle des pays, entre avril 2013 et juin 2015, deux grandes économies aux profils bien différents ont contribué pour près de deux tiers aux créations nettes d’emploi dans l’UE, après des réformes du marché du travail : l’Espagne (avec 725 000 créations d’emploi, qui n’empêchent pas pour autant le niveau d’emploi de rester inférieur de 15 % à celui de l’avant-crise) et l’Allemagne (avec 592 000 créations). Dans le même temps, le nombre d’emplois a augmenté de 190 000 en France, essentiellement dans le secteur public, et de 127 000 en Italie. Ainsi, en 2014 et 2015, pour la première fois depuis 2008 et dans un contexte de reprise modérée de l’activité, le taux de chômage de l’UE diminue, principalement grâce à son recul dans les pays du Sud, où il reste néanmoins élevé. Fin 2015, la France, avec un taux de chômage des 15-74 ans de 10,2 %, se situe au-dessus de la moyenne de l’UE28 (9,0 %) mais en dessous de celle de la zone euro (10,4 %). Le chômage apparaît durablement plus élevé en France que dans d’autres pays comme l’Allemagne ou le Royaume-Uni, mais moins sensible aux fluctuations conjoncturelles : lors des crises, le chômage augmente moins fortement, mais, lors des reprises économiques, il baisse également moins qu’ailleurs.